Ce groupement composé de 3 textes
autobiographiques où le narrateur raconte un "contact
coquin". Quelles sont les circonstances matérielles du
contact (lieu, comparses...) Personnages - Qui "touche"? (identifiez précisément ce
personnage ) - Qui est "touché" ?(identifiez
précisément ce personnage ) - Le contact est-il volontaire ? - Quelle réaction provoque le contact ? - Quel volume occupe dans le texte, le récit
proprement dit du contact ? - Le contact est-il un souvenir ? - A quel temps est raconté le souvenir? - Le contact révèle-t-il la
personnalité du "toucheur" ?
Déterminez-la. FRANCHIR LE FOSSÉ De connivence avec la Marquise de Merteuil, le Vicomte
de Valmont a décidé de séduire la
présidente de Tourvel, une femme dévote et
fidèle. Après une promenade avec Madame de
Tourvel il écrit ici à la Marquise. P.A. Choderlos de Laclos (1741-1803) Les liaisons
dangereuses (1782) ( Lettre VI ) Premier amour (Texte autobiographique) Un voisin de la terre de Combourg était venu
passer quelques jours au château avec sa femme, fort
jolie. Je ne sais ce qui advint dans le village ; on courut
à l'une des fenêtres de la grand'salle pour
regarder. J'y arrivai le premier, l'étrangère
se précipitait sur mes pas, je voulus lui
céder la place et je me tournai vers elle ; elle me
barra involontairement le chemin, et je me sentis
pressé entre elle et la fenêtre. Je ne sus plus
ce qui se passa autour de moi. Dès ce moment, j'entrevis que d'aimer et
d'être aimé d'une manière qui
m'était inconnue, devait être la
félicité suprême. Si j'avais fait ce que
font les autres hommes, j'aurais bientôt appris les
peines et les plaisirs de la passion dont je portais le
germe; mais tout prenait en moi un caractère
extraordinaire. L'ardeur de mon imagination, ma
timidité, la solitude firent qu'au lieu de me jeter
au-dehors, je me repliai sur moi-même; faute d'objet
réel, j'invoquai par la puissance de mes vagues
désirs un fantôme qui ne me quitta plus. Je ne
sais si l'histoire du cur humain offre un autre
exemple de cette nature. Je me composai donc une femme de toutes les femmes que
j'avais vues : elle avait la taille, les cheveux et le
sourire de l'étrangère qui m'avait
pressé contre son sein ; je lui donnai les yeux de
telle jeune fille du village, la fraîcheur de telle
autre. Les portraits des grandes dames du temps de
François 1er, de Henri IV et de Louis XIV, dont le
salon était orné, m'avaient fourni d'autres
traits, et j'avais dérobé des grâces
jusqu'aux tableaux des Vierges suspendus dans les
églises. DANS LE TRAIN (Texte autobiographique : Jean, le
narrateur, est le frère cadet de Frédie) Le compartiment est à moitié vide. Trois
personnes seulement occupent la banquette, en face de moi.
Il s'agit d'une famille nombreuse, le père, anodin,
défini par son pantalon râpé, la
mère, dont les cheveux sont fourchus, la fille qui a
mon âge et qui est tout en cils baissés. Ces
gens-là s'accablent de mots fades, de « ma
petite mère », de « ma chérie
», de baisers dans le cou. La petite refuse un sandwich
au jambon, puis un morceau de rosbif froid. Mijaurée
! Elle m'est antipathique malgré son chandail,
tricoté par elle-même &emdash; les points sont
inégaux et trahissent une main
inexpérimentée &emdash; et percé par
deux tout jeunes seins, qui, eux non plus, ne sont pas
désagréables à regarder. Ils me font
penser à ceux de la petite Bertine Barbelivien, ou
encore à ceux de Madeleine de La Vergeraie, qui sont
tout de même un peu plus gros déjà et
qui sautent sous leurs corsages. Je toucherais bien, si
c'était possible. Je ne sais pourquoi, mais j'ai
envie de toucher ceux-ci par curiosité, vous savez,
pour voir comment c'est fait, si ça résiste,
comment c'est attaché. Attaché comme une joue
sur un visage ou comme une pomme sur un pommier ? A la
réflexion, je pense que cela tient des deux. Et,
réflexion refaite, elle m'agace vraiment, cette
petite que je ne peux pas m'empêcher de regarder,
comme si elle avait quelque chose d'extraordinaire que je
découvrirais aujourd'hui seulement. Elle m'agace,
avec ses cils baissés, qu'elle relève par
instants, laissant échapper un regard prompt, comme
une ablette qui se faufile entre les roseaux. Je me
lève et je vais me camper dans le couloir, face
à la Beauce qui défile maintenant devant moi,
qui se déroule comme une toile de Jouy jaune paille,
imprimée de nielles et de coquelicots. Mais, lorsque
Marie-Thérèse &emdash; c'est sa mère
qui vient de l'appeler ainsi &emdash; descendra du train,
à Chartres, je serai ravi de m'effacer pour la
laisser passer, de m'effacer si mal qu'elle me frôlera
de tout son corps et que je pourrai situer exactement
l'endroit où se trouve la boucle de sa jarretelle,
qui tient son bas de fil sous la jupe plissée. Voilà, elle est partie, cette fille, et j'arpente
le couloir. Il y en a d'autres, mais elles sont trop jeunes
ou trop vieilles. On n'a pas envie de mordre dedans.
Laissons cela. L'amour, comme dit Frédie, si c'est la
même chose que l'amour de Dieu dont on nous
rabâche les oreilles depuis des années,
ça ne doit être encore qu'une fichue blague. Je
rate l'échappée sur la pièce d'eau des
Suisses. Zut !
J'ai dirigé sa promenade de
manière qu'il s'est trouvé un fossé
à franchir; et, quoique fort leste, elle est
encore plus timide: vous jugez bien qu'une prude craint
de sauter le fossé ! Il a fallu se confier
à moi. J'ai tenu dans mes bras cette femme
modeste. Nos préparatifs et le passage de ma
vieille tante avaient fait rire aux éclats la
folâtre dévote: mais, dès que je me
fus emparé d'elle, par une adroite gaucherie, nos
bras s'enlacèrent mutuellement. Je pressai son
sein contre le mien; et, dans ce court intervalle, je
sentis son cur battre plus vite. L'aimable rougeur
vint colorer son visage, et son modeste embarras m'apprit
assez que son cur avait palpité d'amour et
non de crainte. Ma tante cependant s'y trompa et se mit
à dire: «l'enfant a eu peur»; mais la
charmante candeur de l'enfant ne lui permit pas le
mensonge, et elle répondit naïvement: «
Oh non, mais... » Ce seul mot m'a
éclairé. Dès ce moment, le doux
espoir a remplacé la cruelle inquiétude.
J'aurai cette femme; je l'enlèverai au mari qui la
profane: j'oserai la ravir au Dieu même qu'elle
adore. Quel délice d'être tour à tour
l'objet et le vainqueur de ses remords ! Loin de moi
l'idée de détruire les
préjugés qui l'assiègent, ! ils
ajouteront à mon bonheur et à ma gloire.
Qu'elle croie à la vertu, mais qu'elle me la
sacrifie; que ses fautes l'épouvantent sans
pouvoir l'arrêter; et qu'agitée de mille
terreurs, elle ne puisse les oublier, les vaincre que
dans mes bras. Qu'alors j'y consens, elle me dise:
«Je t'adore»; elle seule, entre toutes les
femmes, sera digne de prononcer ce mot. Je serai vraiment
le Dieu qu'elle aura préféré.
F.-R. de Chateaubriand (1768-1848)
Mémoires d'outre-tombe (1830)
Hervé-Bazin : Vipère au poing
(1949)